vendredi 29 juin 2012

Un hiver de clown, par Hermann



J'ai découvert Jérémiah sur le tard, à l'occasion de la sortie du tome 17, qui reprenait un volumineux dossier sur la série. Mais le tome 9, Un hiver de clown ne m'était déjà pas étranger. Etait-ce une réminiscence de la "bande à bébé" ou "Flipboook" ? L'avais-je lu en bibliothèque ou en grande surface, lorsque mes parents m'abandonnaient pendant qu'ils faisaient les courses ? Je le rappelle surtout avoir beaucoup lu "La survivante" de Gillon, à l'époque.
En tout cas, je me rappelais de cette étrange histoire. Je l'ai encore relue dernièrement et Hermann y est vraiment au sommet de son art. J'ai toujours préféré la colorisation de Fraymond à la couleur directe qu'Hermann utilisera dans les années 90. Et il reste avant tout un dessinateur à mes yeux. Ses albums dégagent un vrai dynamisme, un sens de l'atmosphère évident. Il y a quelque chose d'infiniment cinématographique dans son travail. Mais ses intrigues manquent souvent de ce petit quelque chose qui les feraient décoller vraiment. Sa meilleure série reste pour moi Les tours de Bois-Maury, sans doute grâce à l'empathie qui se dessine envers des personnages qui nous accompagnons pendant de longues années et qui poursuivent un but que l'on sait inaccessible.

Jeremiah se situe plus dans la continuité des scénarios de Greg, mais avec une patte évidente. Hermann fut le premier auteur avec qui je découvrais des scénarios où le héros n'en était pas vraiment un. Jeremiah et Kurdy se retrouvent souvent malgré eux embarqués dans une aventure qui n'est pas la leur, parfois même sans saisir ce qui se déroule vraiment. Deux vagabonds qui tombent comme un pavé dans la mare... Ce manque de finalité sera sans doute ce qui rendra la série de moins en moins intéressante. Je cessai de la suivre il y a une petite dizaine d'années, sans regret.
Cela dit, Jeremiah comprend de belles réussites, dont Les eaux de la colère, Julius et Roméa ou Afromerica.
Et, évidemment, Un hiver de clown, album un peu à part parce que Kurdy en est absent.
Jeremiah, flanqué de Lena, tente de rejoindre la civilisation, mais se sont égarés dans forêt enneigée. Ils échouent dans une étrange communauté de freaks... un étrange carnaval qui suinte le malaise. Seuls personnages apparemment normaux: une petite fille et un vieil homme qui semble avoir un certain ascendant sur cette cour des miracles.
Cet hiver de clown vaut pour une ambiance particulièrement angoissante, accentuée par le burlesque de cette étrange communauté, qui, sous des airs débonnaires, se révèle d'une cruauté infinie. Si L'histoire n'est pas à proprement parler mémorable, mais elle fonctionne à merveille et marque durablement.


lundi 4 juin 2012

La chute de Brek Zarith de Van Hamme et Rosinski


 
Il y a des albums qui comptent plus que d’autres dans l’édification du lecteur de bandes dessinées. J’ai été biberonné à l’école de Marcinelle, avec un peu de Tintin et de Goscinny. Pour le reste, ce fut gros nez et Spirou. Je ne m’intéressais pas trop à ce qui se faisait ailleurs. Le journal de Tintin ? Il avait un côté trop « austère » et « pour les grands »... je ne l’avais jamais ouvert jusqu’à ce qu’un jour, je ne tombe sur un ou deux numéros du journal de Tintin. Je m’ennuyais un peu, j’ai fini par les ouvrir. Je m’arrêtai sur quelques pages de la prépublication de La chute de Brek Zarith, sixième épisode des aventures de Thorgal. Je n'en avais jamais entendu parler.
Le choc !
Un dessin réaliste ? Je n’y étais pas vraiment habitué.


Mais surtout, quelle histoire... un héros dont je ne sais rien s’introduit dans une forteresse pour sauver sa famille. Il y découvre que tous les habitants sont morts, empoisonnés. Il ne reste qu’une jeune fille qui agonise dans les bras de Thorgal. On peut raconter de telles choses en bande dessinée ?

Et voila que Jorund-le-Taureau fait son entrée. Avec ses hommes, il découvre la salle au trésor de Brek Zarith : une pièce remplie d’or, presque aussi extravagante que la piscine de Picsou. Il se précipite pour jouir de toutes ces richesses. C’est sans compter sur la cruauté de Shardar-le-Fou, tyran de Brek Zarith, qui a piégé cette salle. Un bruit sourd s’élève. Jorund, surpris, réalise le danger, mais se retrouve piégé dans la salle, aspiré par les pièces d’or et les bijoux… le sol est en train de s’ouvrir sur un gouffre sans fond, l'entraînant dans une mort atroce. Suite au prochain épisode…
Je n’en sus pas plus avant plusieurs années. Mais le virus était implanté. La bande dessinée, c’était bien plus que ce que je ne pensais. Et ce que je venais de lire m’avait marqué. Un peu plus tard, je découvris Le cimetière de cathédrale, un truc assez incompréhensible, qui ne ressemblait à rien. Mais je sentais que quelque chose se passait, une fois de plus.
Finalement, j’ai découvert les albums de Thorgal, ses origines, la raison de sa présence à Brek Zarith et ce qu’il advint par la suite… Alinoë, le pays Qâ, la gardienne des clés et tant d’autres choses.
Rien que pour ces quelques pages, Van Hamme et Rosinski occuperont toujours une place un peu à part dans mon petit panthéon personnel. Thorgal aura connu bien des aventures, certaines très mauvaises, d'autres excellentes. Mais il reste spécial pour moi.