Les Toyottes est une série un peu à part dans la carrière de Raoul Cauvin, et ce à plus d'un titre. En 1980, Cauvin met un terme à son contrat d'exclusivité avec Dupuis. Il
entame cette série avec Louis-Michel Carpentier chez
Casterman, sans être crédité. Après 2 premiers épisodes passés inaperçus, il décide de signer les
scénarios à partir du tome 3. Mais les ventes ne décolleront jamais et la série sera
finalement annulée après le cinquième tome.
Ablette |
Paradoxalement, lorsque le nom de Cauvin est apparu sur les couvertures, les critiques fusèrent pour regretter l'affadissement de la
série depuis que Cauvin en assurait le scénario. La qualité
avait-t-elle effectivement baissé entre les tomes 2 et 3 ? Pas vraiment, ils sont de
qualité égale, et plutôt réussis. Mais Cauvin était victime d'un délit de faciès. Mal aimé, déjà à l'époque, il était de bon ton de le dénigrer. Depuis, d'autres auteurs "bénéficient" de ce traitement de faveur. Ironiquement, à la même époque, certains regrettaient que Berck perde son temps sur Sammy, scénarisé par Cauvin, au lieu de se consacrer à sa propre série Lou. Cauvin en a pourtant signé tous les scénarios, mais n'était pas crédité parce qu'il ne voulait donner l'impression de remplir le journal de Spirou à lui tout seul.
Cauvin n'était visiblement jamais aussi bon que lorsqu'il ne signait pas ses scénarios. Comme quoi...
Mais revenons aux Toyottes, série animalière post-apocalyptique qui n'est sans doute pas mémorable mais qui mérite d'être redécouverte.
En ce temps-là... les hommes avaient détruit leur propre monde. A force de bombes de plus en plus nombreuses, de plus en plus destructrices, ils avaient transformé la surface du globe en un vaste charnier. Seul le peuple souterrain des rats échappe au désastre...
Le décors est posé.
De là, Cauvin et Carpentier propose une série qui capitalise sur des ressors classiques, essentiellement basé sur une galerie de personnages fortement typés parmi lesquels on retrouve le roi autoritaire, détestable et ridicule Claudius
Rapedadédilapoulos IV, qui règne de main de fer sur une communauté de rats noirs étrangement exclusivement masculine.
Claudius Rapedadédilapoulos IV et Cyprien le râleur |
Il y a le prince héritier Barnabé, queue-de-race débile, Thémistocle, le conseiller pleutre toujours d'accord avec son souverain (« à votre avis, Siiiiire »),
le sergent grande gueule qui n'est pas sans rappeler le capitaine Starck (et, sans doute, le frère de Cauvin, militaire de carrière),
Gédéon l'inventeur enthousiaste, Cyprien le râleur congénital et l'imbécile Ablette
("mais qu'il est bête, celui-là").
Apparaîtront par la suite les seules femmes de la série, la Reine Claude (archétype de la femme hystérique) et sa fille la Princesse Macédoine de Légumes (pendant de Barnabé), qui règnent sur une communauté de rats blancs, étrangement exclusivement... masculine. C'est d'ailleurs l'une des bizarrerie de cette série, les 2 peuples semblant être le reflet l'un de l'autre, il aurait été logique que les rats blanches soient toutes femelles.
Faut-il y voir une forme de sexisme de la part des auteurs ? Je ne pense pas que cela soit conscient de leur part. Les personnages féminins restaient rares dans la bande dessinée, et cantonnés à des rôles mineurs et stéréotypés. Les Laureline, Yoko Tsuno, queue-de-Cerise, Comanche et quelques autres restaient des exceptions dans un monde très bien pensant. Les lignes commençaient à peine à bouger et Cauvin n'a jamais fait partie des pionniers en la matière.
Et l'accusation de sexisme tiendrait si les personnages masculins bénéficiaient d'un traitement de faveur. Or, ils ne sont que des archétypes de comédies, guère flattés par les auteurs. La Reine Claude et le Roi Claudius font franchement jeu égal. Pas un n'échappe au ridicule. Les Toyottes était une série finalement banale, qui, consciemment ou non, évitait toute sexualisation du propos parce qu'on s'adressait à des mômes.
Pourtant, malgré cet aspect banal, presque désuet, j'ai toujours gardé une tendresse pour cette série mal aimée, mais que les auteurs ont tenté de rescussiter plusieurs fois, d'abord sous la formes de gags plus caustiques, d'un livre jeu et même d'un jeu vidéo, mais sans succès.
Elle repose sur des mécanismes classiques et sans surprises. Pour une raison ou une autre, les Toyottes sont contraints de sortit pour affronter les dangers de l'extérieur. Mais les situations fonctionnent bien, l'univers est amusant et les personnages bien utilisés.Et j'avoue la relire de temps en temps avec plaisir. Il suffit de la prendre pour ce qu'elle est.
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