Merci tout d'abord aux éditions Warum et à l'opération Masse Critique de
m'avoir permis de découvrir ce livre (et un peu moins merci à la poste pour l’avoir
bourré dans ma boite aux lettres... il n'en est pas sorti tout-à-fait indemne).
La nouvelle est un genre tombé en désuétude chez nous. La norme est au roman et le court récit, exercice moins facile qu'il
n'en a l'air, rare en francophonie, alors qu'il reste un genre vivace dans
d'autres cultures. Par contre, les sud-américains ont conservé un goût pour ce
genre littéraire. Les noms de Cortazar et Borgès (qui possédait en plus un sens
de la brièveté parfois vertigineux) me viennent directement à l'esprit.
Par contre, je ne connaissais pas
l'uruguayen Horacio Quiroga.
Étrange destin que celui de cet homme qui
vit la mort rythmer son existence. Son père meurt accidentellement lorsqu’il
est enfant. Son beau-père ainsi que sa première femme se suicident. Lui-même
abattit accidentellement son meilleur ami lors d'une partie de chasse. Il n'est
donc pas étonnant que son oeuvre, considérée comme fondatrice du réalisme
magique, soit marquée par l'amour et la mort. L'un de ses livres les plus
célèbres s'intitule d'ailleurs Contes d'amour, de folie et de mort.
Trois nouvelles extraites de ce recueil ont été adaptées en bande dessinée par les
argentins Lautaro Ortiz, rédacteur en chef de la revue de BD Fierro, et Lucas Nine, fils du dessinateur Carlos Nine (mais qui vaut bien plus que de n'être
que le fils de...).
Trois récits baroques.
Trois récits d'amour et de mort.
Alicia étouffe dans un mariage morne.
Elle espérait une union romantique et passionnée. Elle doit se contenter d'un
mari froid et souvent absent. Est-ce pour cela qu'elle commence à s'étioler ?
Deux amants maudits se suicident et
espèrent pouvoir enfin vivre leur amour dans la mort.
Un savant tente de retrouver l’image de
celle qu’il a aimé.
Edgard Allan Poe n'est pas loin. On
retrouve cette ambiance baroque, cette poésie morbide...
Optant pour un format très allongé, les
personnages prennent l'allure de spectres qui déambulent dans un univers
étriqué. Lucas Nine opte pour une approche surréaliste qui n'est pas sans
rappeler le travail de Frédéric Bézian sur La Danse des morts (mais
en couleur) ou celui d'Alberto Breccia, le génial auteur argentin qui a livré
quelques unes des plus belles planches adaptées de l'univers de EA Poe. Comme le
maître argentin, il mélange les techniques et s’appuye sur des photos et
collages, essentiellement dans le dernier récit de ce recueil.
Le coeur révélateur, de Breccia: une merveille |
Les éditions Warum continue de proposer
de beaux livres, tant pour l'objet que pour la qualité des oeuvres. Ce recueil
m'a séduit. Il s'en dégage une beauté particulière et vénéneuse. On le referme
en ayant furieusement envie de découvrir Horacio Quiroga.
Une très belle surprise.
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