Cette chronique a été réalisée dans la cadre de l'opération Masse Critique de Babelio.
Il est chauffeur de taxi à Bruxelles.
Il sillonne la ville le soir, rencontre des clients sans vraiment les rencontrer.
Il en a un régulier: Henry, vieux monsieur qui ne porte que des chemises à fleurs qu'il embarque chaque vendredi, samedi et dimanche à hauteur du 1243 Boulevard Anspach, à 20:30.
Il l'emmène dans un bar miteux de le rue des Hortensias, à l'autre bout de la ville. Pour le retour, Henry préfère la solitude.
Le reste se sont des courses qui se ressemblent toutes. A peine une sur 100 qui sort du lot.
Et encore...
Il n'avait pas rêvé cette vie-là.
Il voulait être journaliste.
Diplôme en poche, il pensait que sa voie était tracée.
Mais, à 23 ans, le premier enfant, pas vraiment programmé. Il fallait un taf. Face à l'urgence de sa situation, il a pris ce qui se présentait, en attendant mieux. Juste le temps de se retourner.
Cela fait 15 ans que ça dure.
Entre temps, deux autres enfants sont venus. Il s'en est pris pour 30 ans de crédit pour une maison.
Parce qu'il en faut bien un pour sa famille.
Pour sa femme, Léa, qu'il a follement aimé.
Qu'il aime encore...
L'aime-t-il seulement encore ?
Il ne sait plus.
De cette vie de famille, il ne ressent plus que la routine, les tâches quotidiennes, les corvées...
Un nid douillet dans lequel il étouffe.
Léa semblent s'y plaire. Lui s'y noie un peu plus chaque jour.
Chaque matin, il dresse l'inventaire des douleurs qui l'assaillent. Cette douleur au testicule droit est-elle le signe d'un cancer? Et cette douleur intercostale qui l'ennuie depuis 12 ans, quel maladie annonce-t-elle ? Et cette raideur dans la nuque?Heureusement, il y a la musique qui l'accompagne partout.
Les souvenirs de concert.
Les chansons.
Bashung. Souvenir intense de son dernier concert à l'AB.
Et ces paroles, comme un mantra
Un beau programme qu'il s'est ingénié à ne pas respecter.
Les péages, il n'en a pas raté un seul.
Il a 38 ans.
Il rencontre Marie
Il a déjà remarqué cette jolie rousse déjà aperçue dans les cafés de la place Flagey, lorsqu'il traîne avec son ami Benjamin, sans jamais avoir osé l'aborder.
Un jour, il se lance.
Il lui parle.
Elle répond.
S'en suivent 3 semaines de passion débridée.
Et puis ?
Rien. Tout s'arrête.
Il ne sait pas quoi faire.
Quitter sa femme ? Tirer un trait sur 16 ans de sa vie ? Tirer un trait sur ses 3 enfants qu'il aime ? Tirer un trait sur une femme qu'il a aimé et qu'il n'est pas sûr de ne plus aimer.
Et pourquoi ? Pour une passion éphémère qui ne débouchera peut-être sur rien d'autre qu'une nouvelles routine ? D'autres lave-vaisselle à vider ? D'autres étagères à fixer ? Un autre crédit ?
Il ne sait pas.
Quand s'est-il retrouvé, sans le vouloir, sur cet autoroute de la vie, avec ses péages, mais sans chevaux hennissant de plaisir?
Il cherche une réponse.
Comme si sa vie en dépendait.
D'ailleurs, sa vie en dépend.
Il doit choisir.
Léa ou Marie?
Marie ou Léa?
Il se raccroche à la musique qui rythme ses journées et ses nuits.
Bashung, évidemment.
Léonard Cohen.
Et, qui sait ? A Love Supreme de John Coltrane.
L'auteur de ce premier roman, Jérôme Colin est un journaliste culturel belge, connu pour Entrez sans frapper émission culturelle quotidienne sur la Première et comme présentateur d'une des meilleurs émissions d'interviews francophones: Hep taxi, dans laquelle il recueille les confidences de ses invités dans un taxi. Autant dire que le personnage principal de son roman est fortement inspiré de lui-même.
Pour son premier roman, il a pris pour sujet cette crise de la quarantaine, qu'il vient de traverser. Son livre est nourri de détails et de réflexions qui sonnent justes. Puis il y une écriture élégante et fluide qui vous entraîne.
Et une bande originale qui transcende chaque page.
Évidemment, question de génération et de goûts musicaux, ce livre me parle tout particulièrement.
Bashung a l'AB, j'y étais en 2008.
Anthem de Leonard Cohen, ma femme me l'a fait découvrir il y a longtemps
Ça me parle.
Son aversion pathologique d'Indochine, un peu moins.
Jérôme Colin touche juste. Il a une plume, des idées, de belles références et une grande humanité.
Il signe un beau premier livre, touchant et amusant.
Il sillonne la ville le soir, rencontre des clients sans vraiment les rencontrer.
Il en a un régulier: Henry, vieux monsieur qui ne porte que des chemises à fleurs qu'il embarque chaque vendredi, samedi et dimanche à hauteur du 1243 Boulevard Anspach, à 20:30.
Il l'emmène dans un bar miteux de le rue des Hortensias, à l'autre bout de la ville. Pour le retour, Henry préfère la solitude.
Le reste se sont des courses qui se ressemblent toutes. A peine une sur 100 qui sort du lot.
Et encore...
Il n'avait pas rêvé cette vie-là.
Il voulait être journaliste.
Diplôme en poche, il pensait que sa voie était tracée.
Mais, à 23 ans, le premier enfant, pas vraiment programmé. Il fallait un taf. Face à l'urgence de sa situation, il a pris ce qui se présentait, en attendant mieux. Juste le temps de se retourner.
Cela fait 15 ans que ça dure.
Entre temps, deux autres enfants sont venus. Il s'en est pris pour 30 ans de crédit pour une maison.
Parce qu'il en faut bien un pour sa famille.
Pour sa femme, Léa, qu'il a follement aimé.
Qu'il aime encore...
L'aime-t-il seulement encore ?
Il ne sait plus.
De cette vie de famille, il ne ressent plus que la routine, les tâches quotidiennes, les corvées...
Un nid douillet dans lequel il étouffe.
Léa semblent s'y plaire. Lui s'y noie un peu plus chaque jour.
Chaque matin, il dresse l'inventaire des douleurs qui l'assaillent. Cette douleur au testicule droit est-elle le signe d'un cancer? Et cette douleur intercostale qui l'ennuie depuis 12 ans, quel maladie annonce-t-elle ? Et cette raideur dans la nuque?Heureusement, il y a la musique qui l'accompagne partout.
Les souvenirs de concert.
Les chansons.
Bashung. Souvenir intense de son dernier concert à l'AB.
Et ces paroles, comme un mantra
Marcher sur l'eau
Éviter les péages
Jamais souffrir
Juste faire hennir les chevaux du plaisir
Un beau programme qu'il s'est ingénié à ne pas respecter.
Les péages, il n'en a pas raté un seul.
Il a 38 ans.
Il rencontre Marie
Il a déjà remarqué cette jolie rousse déjà aperçue dans les cafés de la place Flagey, lorsqu'il traîne avec son ami Benjamin, sans jamais avoir osé l'aborder.
Un jour, il se lance.
Il lui parle.
Elle répond.
S'en suivent 3 semaines de passion débridée.
Et puis ?
Rien. Tout s'arrête.
Il ne sait pas quoi faire.
Quitter sa femme ? Tirer un trait sur 16 ans de sa vie ? Tirer un trait sur ses 3 enfants qu'il aime ? Tirer un trait sur une femme qu'il a aimé et qu'il n'est pas sûr de ne plus aimer.
Et pourquoi ? Pour une passion éphémère qui ne débouchera peut-être sur rien d'autre qu'une nouvelles routine ? D'autres lave-vaisselle à vider ? D'autres étagères à fixer ? Un autre crédit ?
Il ne sait pas.
Quand s'est-il retrouvé, sans le vouloir, sur cet autoroute de la vie, avec ses péages, mais sans chevaux hennissant de plaisir?
Il cherche une réponse.
Comme si sa vie en dépendait.
D'ailleurs, sa vie en dépend.
Il doit choisir.
Léa ou Marie?
Marie ou Léa?
Il se raccroche à la musique qui rythme ses journées et ses nuits.
Bashung, évidemment.
Léonard Cohen.
Et, qui sait ? A Love Supreme de John Coltrane.
L'auteur de ce premier roman, Jérôme Colin est un journaliste culturel belge, connu pour Entrez sans frapper émission culturelle quotidienne sur la Première et comme présentateur d'une des meilleurs émissions d'interviews francophones: Hep taxi, dans laquelle il recueille les confidences de ses invités dans un taxi. Autant dire que le personnage principal de son roman est fortement inspiré de lui-même.
Pour son premier roman, il a pris pour sujet cette crise de la quarantaine, qu'il vient de traverser. Son livre est nourri de détails et de réflexions qui sonnent justes. Puis il y une écriture élégante et fluide qui vous entraîne.
Et une bande originale qui transcende chaque page.
Évidemment, question de génération et de goûts musicaux, ce livre me parle tout particulièrement.
Bashung a l'AB, j'y étais en 2008.
Anthem de Leonard Cohen, ma femme me l'a fait découvrir il y a longtemps
There is a crack in everything
That's how the light gets in.
Ça me parle.
Son aversion pathologique d'Indochine, un peu moins.
Jérôme Colin touche juste. Il a une plume, des idées, de belles références et une grande humanité.
Il signe un beau premier livre, touchant et amusant.
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